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Photo du rédacteurMarie-France Lesage

Lettre à Cosimo - Mon journal du Covid 19 - Deuxième partie




Lundi 28 décembre:

Par ouï-dire, beaucoup de familles ont fêté Noël par petits groupes restreints

qui cependant dépassaient la bulle familiale (les gens qui vivent sous le même toit

plus une personne) que le gouvernement nous avait imposée. Pour plus de discrétion,

les pièces étaient bien occultées, les voitures restaient à la maison, les invités arrivant à pied, se garant hors de vue ou se faisant véhiculer par le maître de maison.

D’autres comme nous, le fêtaient à l’extérieur entre quatre adultes. Malgré ces petites incartades, le ministre de la santé, ce matin à la radio, paraissait satisfait.


Je viens de terminer le livre d’Alice Ferney: « Les Bourgeois ». L’histoire d’une famille française, nombreuse, catholique, ayant traversé le vingtième siècle tout comme

la famille de Didier: « les Bonmariage-Grosdent » dont je viens de retracer la petite histoire.

Pour le faire, j'ai scanné plus de mille documents de cette famille dont je suis une pièce rapportée ( c'est ainsi que l'on nomme les beaux-enfants) mais dont je me sens membre

à part entière. « Chaque photographie a figé la rivière des moments mais les moments sont passés

à jamais. Celui qui contemple l’image contemple le passé perdu et mesure la durée

qui l’en sépare. »

Alice Ferney

Jeudi 31 décembre:

Les hauteurs de la Belgique sont couvertes de neige depuis plusieurs jours.

Vu l’affluence, les autorités ferment les routes y accédant, empêchant les gens

de s’y balader. Nous sommes vraiment emprisonnés!


Voici les voeux que je viens d’envoyer avec la photo du rondo final des Blancs Moussis

au carnaval de Stavelot:

Au plaisir de vous revoir l’année prochaine,

De vous prendre dans nos bras,

De vous faire la bise

Ou de simplement vous serrer la main.

En espérant

Toujours

Porter le masque

A Stavelot, à Nice,

À Rio ou à Venice


Vendredi 1er janvier:

Pour la nouvelle année, nous avons été promener avec toi, nos deux filles, Olivier et Tikal. RV était donné au Col du Rideux. Engoncé dans ta salopette de ski, tu nous as fait

quelques beaux vols planés dans les flaques de boue que tu affectionnes

et vers lesquelles tu t’élances sans retenue.

Géraldine vient de m’annoncer que tu ne viendrais plus que les six prochains mardis.

Après les vacances de carnaval, tu rentreras à l’école maternelle. Quelle nouvelle déprimante! Comme ces deux ans et demi ont été vite passés! Nous sommes cependant heureux de t’avoir consacré un jour par semaine. Cela a créé des liens indissolubles

et nous a permis de participer à ta construction.

Depuis cette nuit, le Royaume-Uni ne fait plus partie économiquement de la communauté européenne. Un deal a été signé entre les deux parties, juste avant la date butoir.

Tout le monde attend avec beaucoup d’appréhension l’évolution de ce Brexit.


Dimanche 3 janvier:

Je monte à pied souhaiter une bonne année à Tonton. Dans l’obscurité de la cuisine

en pleine rénovation, j’effraie Guillaume qui surpris me fait la bise. Oufti, c’est la première

de l’année et la première depuis des mois. Nous en rions!


Chez nos amis du Beaujolais, le couvre-feu est passé à 20h00. Chez leurs voisins de Macon, à 18h00.

Mercredi 6 janvier:

Comme chaque année, Félix a remporté la fève et la couronne des Rois.

Sa personnalité se révèle et se libère à l'école, chaque jour de plus en plus.

Voici sa présentation pour le cours de français:

"Test portrait physique et moral.

Le mangeur de choucroute.

Bonjour,

Je m’appelle Félix D. J’ai onze ans mais dans onze jours, j’aurai douze ans.

Ma maison est là depuis cinq générations. Elle est vieille comme la guerre.

Je suis la cinquième avec mes deux soeurs: Lucie qui a onze ans, oui,

elle est ma jumelle, et Alice qui a quatorze ans.

J’ai une grosse tête comme les têtes à claques avec un gros nez et des lunettes noires

au-dessus de mes petits yeux bleu-gris. Mes cheveux sont blonds et ils aiment

bien porter des chapeaux. Je trouve que je suis trop gros mais tout le monde dit que non.

Les pulls jaune moutarde, ça me connait. Je ressemble à un sapin. Ils n’ont jamais

de feuilles en dessous. C’est pareil avec moi. Je mets souvent des shorts.

Mes chaussures sont des Vans, je chausse du 40,5.

Je suis un fan des choucroutes, de plein de pays comme l’Angleterre, le Canada, l’Allemagne, le Japon et pour finir, la Russie. Un avion est en moi, j’aime voyager.

J’aime l’Allemagne pour ses panneken, le Japon pour ses mangas. J’aime beaucoup

de choses mais je n’aime pas les « crepers », le foot et les gens qui se sentent

plus fort que les autres. Et je parle beaucoup et je suis chiant."


Il oublie de mentionner qu'il pleure facilement

Aux Etats-Unis, les supporters de Trump qui n’acceptent pas sa défaite ont investi

le Capitole. Ces images d’insurrection sont effrayantes. On dénombre des morts

dans ce temple de la démocratie.

Depuis deux mois, Trump clame que les démocrates lui ont volé la victoire avec des votes illégaux. Ses nombreuses affirmations n'ont jamais été confirmées par la justice.

Au Royaume-Uni où plus de 75.000 morts du Covid ont déjà été enregistrés,

Boris Johnson annonce un nouveau confinement ferme jusqu’au mois de mars:

écoles fermées, déplacements limités. Avec l’aggravation des contaminations,

les services médicaux risquent d’être submergés dans les prochains jours.

De vivre dans ce climat d’angoisse, j’ai eu l’impression d’entrer dans un livre de la collection Actes Noirs quand, cet après-midi, j’ai croisé un barbu aux cheveux noirs déambulant sur le Chemin des Crêtes tenant au bout du bras...une tronçonneuse.


Jeudi 7 janvier:

Marcelline et Gaston, les jumeaux de Fanny, sont nés aujourd’hui. Elle ne pourra pas recevoir de visite à la maternité. Ma cousine Julie est entrée aux urgences, seule,

personne ne pouvait l’accompagner. Tous ces contacts humains nous manquent terriblement.

Le vaccin est à la une de l’information. Tous les résidents et le personnel soignant des maisons de repos seront vaccinés d’ici la mi-février. Ensuite, ce seront les personnels médicaux, les plus de 65 ans et les patients à risque. Nous serons dans la dernière tranche de la population qui sera vaccinée à partir de juin.


" Différents facteurs ont joué pour expliquer la rapidité de mise sur le marché de certains vaccins. D’abord, le COVID-19 est un cousin du SARS-COV-1, autour duquel il existait déjà tout un corpus d’expérimentations. Deuxièmement, la virologie a fait d’énormes progrès dans le développement des vaccins à ARN-messager, qui préexistaient au COVID-19.

Troisièmement, il y a une armée de chercheurs qui s’est aussitôt mise en route

dans tous les pays du monde, avec la mobilisation de tous les laboratoires

et d’énormes investissements publics.

Et enfin, on a la « chance » que ce soit un virus assez « simple », sur lequel on arrive

à une assez bonne réaction immunitaire « classique », avec des méthodes de fabrication

que l’on maîtrise relativement bien.

Et puis, comme il y avait urgence, on a accéléré les essais cliniques."

Extrait de l’interview de Marius Gilbert par Claude Semal

Vendredi 8 décembre:

Peu de changement lors du conseil de concertation du jour. Seuls, les centres d’examen

des auto-écoles pourront rouvrir. Il faudra attendre le prochain conseil du 22 janvier

pour voir si les chiffres de contamination ont diminué et penser à rouvrir les métiers

de contact, la culture et l’Horeca.

Lundi 11 janvier:

Ce dimanche, comme toutes les stations de ski et les entrées d’autoroute qui y mènent

sont fermées, c'est la ruée dans les prés et les champs pour profiter de la neige, sans respect pour les clôtures et la nature. Comme les gens ne peuvent plus rien faire comme activité, ils font n’importe quoi.

Les chiffres de contamination sont à la hausse et l'on dénombre à ce jour, plus de 20.000 morts du virus.

Afin de me protéger, me dit-elle, Alice refuse toujours de me faire la bise. Je lui demande

si elle m’en fera une quand je serai morte. Cette question la trouble et pour me faire plaisir me promet que oui tout en pensant bien que non.

Mardi 12 janvier:

Tu dérapes et roules comme un fou avec ton vélo en plastique. Puis tu termines

avec un wheeling avant de te retrouver par terre en riant aux éclats.

Vendredi 15 janvier:

Cette nuit, Andrée a teint mes beaux cheveux blancs en une couleur brune méchée de roux. J’en ai pleuré. Heureusement ce n’était qu’un cauchemar.

La France abaisse le couvre-feu à 18h00 dans tout le pays.

Samedi 16 janvier:

Tu as fait une descente en traineau avec ta maman. Cela ne t’a pas plu. Et quand tu n’es pas d’accord, tu le fais savoir en alignant les "putain" et "dégueulasse".

Dommage que tu parles comme un charretier, toi qui fais la nuance entre

un canard et un caneton.


Ce soir, la revue en ligne « Pourtant » proposait pour la cinquième fois de participer

à son « Vol de nuit ». Le thème était « Tenue du suaire obligatoire et marchand de sable » tiré de la chanson « Champagne » de Jacques Higelin:


Cauchemars, fantômes et squelettes,

laissez flotter vos idées noires

Près de la mare aux oubliettes,

tenue du suaire obligatoire


Voici les photos que j’ai envoyées:


Masque à rat


Cessez cette mascarade, nos regards sont vides et nos vies pourries.


Mercredi 20 janvier:

Nous venons de regarder l’investiture de Joe Biden aux Etats-Unis. Nous n’avions jamais suivi les élections d’aussi près. Donald Trump est parti comme un malfaiteur, abandonné

par sa cour et refusant d’assister à la passation de pouvoir.

Ce fut une journée inhabituelle pour Washington, suite aux restrictions sanitaires

dues au Covid et à la peur d’un terrorisme venant de l’intérieur après l’invasion du Capitole, le 6 janvier dernier, les rues de la capitale étaient désertes, patrouillées par 25.000 soldats. 190.000 drapeaux américains avaient été plantés sur les pelouses devant le Capitole

pour représenter le public absent. Le discours du nouveau président était axé sur l’unité

et le respect de la démocratie. Il souhaite gouverner en américain plus qu’en démocrate.

La diversité de son équipe en est la preuve puisque sa vice-présidente est la première femme à remplir cette fonction tout comme sa secrétaire à l’intérieur qui est la première Amérindienne.

Joe Biden a du pain sur la planche. La pandémie a déjà causé la mort de plus de 400.000 Américains, elle annonce une grave crise sanitaire et économique.

Personnellement, nous attendons le nouveau décret qui nous permettra à nouveau d’entrer aux Etats-Unis. Pour Trump, comme nous avions voyagé en Iran, nous étions associés

à des terroristes et l'entrée du territoire nous étaient interdites comme aux citoyens de certains pays à majorité musulmane.

Jeudi 21 janvier:

Maman a nonante et un ans. J’ai laissé tomber le masque pour lui faire un petit bisou,

elle en a tant besoin. Je lui ai offert un chemisier rouge, sa couleur préférée qu’elle s’est empressée d’essayer avant de l’adopter. Elle est toujours aussi coquette.

Vendredi 22 janvier:

Depuis le début de la semaine, Alice retourne à l’école un jour sur deux plutôt qu’une semaine sur deux. Il semble que beaucoup de jeunes sont en décrochage scolaire.

La semaine dernière, les étudiants en dernière année du lycée de Paola ont envoyé

une lettre à l’échevin de l’instruction publique ainsi qu’à la ministre de l’Education

pour leur demander de pouvoir rentrer à l’école. Pour l’instant, ils ont cours en présentiel

un seul jour par semaine. Dans les universités et hautes écoles, tous les cours sont donnés en distanciel. Les étudiants sont en manque de contacts sociaux, primordiaux à cet âge.


Pendant les fêtes de fin d’année, 160.000 personnes sont parties en voyage,

40% de ceux qui ont rentré le PLF (formulaire de localisation du passager)

ne se sont pas fait tester le premier et le septième jour après leur retour. Dans ce cas,

ils pourraient être sanctionnés d’une nouvelle amende de 250,00€.


Samedi 23 janvier:

Je me lève à 7 heures du matin, je pars dans le froid et l'obscurité avec cependant,

un sentiment de liberté. J’avais tellement envie de quitter la maison que je suis partie seule

au FOMU d’Anvers, visiter l’expo sur Martine Franck. Didier trouve que c’est incivique

de m'accompagner. Par contre, ça ne l’est pas quand ses copains passent boire un petit café à la maison. Nous sommes samedi et le train de 9:00 pour Bruxelles-Ostende

est bondé, tout comme le sera le Meir cet après-midi. Des files de clients attendent

devant les magasins de pouvoir entrer. Les distances ne sont pas vraiment respectées malgré les stewards présents tous les cinquante mètres.


Dimanche 24 janvier:

Lucie et Paola sont venues dormir à la maison. Voilà des mois que ce n’était plus arrivé. Comme je ferme tout le mois de janvier, je leur propose de dormir dans une chambre d’hôtes. Elles en sont ravies et se construisent une cabane à l’intérieur pour écouter

la play liste que Paola a élaboré pour l’occasion. Dés la fin du déjeuner, elles foncent

en pyjama dans la neige qui est tombée en abondance cette nuit pour construire un bonhomme de neige dans le jardin.



Mardi 26 janvier:

Tu as beaucoup d’humour, parfois surréaliste quand en balade, tu me demandes

de te porter car tes jambes sont dans la poubelle!

Heureuse nouvelle, ta maman ne te mettra pas tous les jours à l’école, nous te garderons encore tous les mardis jusque septembre.

Félix jongle aussi avec le vocabulaire: sa classe est pleine de saumons et il parle de couleurs maternelles. Association d’idée qui lui fait remplacer « thons » et « primaires ».

Mercredi 27 janvier:

Les voyages non-essentiels vers l’étranger sont interdits jusque fin février!

Jeudi 28 janvier:

Ces derniers jours, des manifestants anti-Covid ont saccagé différentes villes des Pays-Bas.

Chez nous, les jeunes de 12-18 ans pourront de nouveau avoir une activité extra-scolaire, en extérieur, par groupes de dix et avec port du masque. Les moins de douze ans

qui précédemment avaient gardé la liberté de pratiquer toutes les animations extra scolaires seront à présent limité à une seule. Drôle d’équilibrage qui restreint la liberté des plus jeunes et ne facilite pas la vie de Charlotte dont les garçons ont commencé en septembre, quatre activités. Laquelle choisir? Si son fils arrête le football, il n’y aura plus assez d’enfants

pour s’entrainer, s’il arrête la guitare, il ne pourra pas passer l’examen de fin d’année,

s’il cesse de participer à l’atelier d’expression, l’ASBL risque de disparaître.

Heureusement, le choix est laissé à l’appréciation des parents et elle pense bien n’en supprimer aucune.

La Communauté européenne se rebiffe car la firme AstraZeneca semble favoriser

les envois de vaccin vers la Grande-Bretagne plutôt que vers le continent européen.

Vendredi 29 janvier:

Je me sens comme une gamine punie dans sa chambre. Oh, pas de soucis, elle est jolie

et bien aménagée et j’ai tout pour m’occuper mais j’aimerais tellement entendre

tourner la clé dans la serrure, ouvrir la porte et sortir de la maison. Il m’arrive parfois

de ne pas respecter cet emprisonnement, d’entrebâiller la fenêtre et de partir en cachette passer la soirée avec des amis. A part attraper un fou rire, je ne risque pas grand chose

car eux, comme moi, ont déjà été contaminés par le virus. Il faut juste penser à rentrer

avant le couvre-feu de 22h00 que beaucoup ne respecte pas. Nous entendons encore de nombreuses voitures passer la nuit sous nos fenêtres.

Samedi 30 janvier:

Tu passes le WE à la maison avec les inséparables Paola et Lucie. Tes parents sont partis pour une escapade à vélo. Il fait 2°, il pleut depuis une semaine, l’Ourthe est sortie de son lit et se répand dans les champs. Nos cyclistes comptent parcourir une centaine de kilomètres!

Ils renonceront après quarante kilomètres. Manuel, à l’origine du projet, avait les pieds gelés. Ils ont pris le train à Visé pour rentrer à Liège et repartir en voiture après

une bonne douche vers la chambre d’hôtes qu’ils avaient réservée à Raeren.

Je trouvais l’idée un peu utopiste pour la saison!

Dimanche 31 janvier:

Voilà un an, les huit premiers Belges étaient rapatriés de Wuhan, la ville chinoise

où le Covid est apparu. A leur retour de Chine, ils avaient été placés en quarantaine

à l’hôpital de Melsbroeck.


Jeudi 4 février:

La pluie s’est arrêtée, un soleil timide et 6° me donnent l’envie de partir à vélo.

L’eau sort de partout, envahi les chemins et clapote dans les rigoles.

Cette année, mon abonnement théâtre ne m’a pas encore donné la possibilité de voir

une seule pièce. Toutes les représentations ont été annulées. En étrennant sa nouvelle application, le Théâtre de Liège nous offre une pièce en streaming. A neuf heures pétantes, nous sommes devant notre télévision pour découvrir cette nouvelle pièce mais les plans caméra sont trop monotones et je commence à somnoler ce qui, pour ma part, n’arrive jamais devant le petit écran.

La ferme de la Madelonne propose également des concerts en streaming contre 10,00€

de contribution. Cela ne nous tente pas vraiment si ce n’est pour les soutenir.

C’est l’ambiance de ce club de Jazz que nous aimons, la vieille grange où l’on sirote

un verre d’Orval, assis sur d’antiques strapontins de bois. Souvent mal assis, mal debout mais toujours heureux du spectacle dans une ambiance surchauffée et conviviale.


Gouvy is groovy


Vendredi 5 février:

J’adore quand à peine entré, tu remarques et caresses le nuage de gypsophile frais

que j’ai placé sur la table ou quand tu prends le manche d’un jouet cassé

et que tu te mets à fumer. De qui tiens-tu cela, personne ne fume dans la famille?

Le comité de concertation vient d’annoncer l’ouverture des coiffeurs pour le 13 février.

Didier, impatient de revoir Andrée, sa coiffeuse, a pris rendez-vous pour le 15.

C’est une petite mesure d’allégement qui compte pour beaucoup de personnes.

La coiffure est importante dans notre représentation sociale. Pendant ce deuxième confinement, j’ai remarqué que les têtes étaient moins laissées à l’abandon

que lors du premier, la population contourne l’interdiction, se faisant discrètement coiffer

à domicile par une parente, une amie ou même un professionnel.


Samedi 6 février;

J’ai rouvert mes chambres d’hôtes. Didier est heureux de revoir des gens

et de papoter avec eux. J’entends à nouveau des éclats de rires dans la maison.

Dimanche 7 février:

Nous avons rejoint votre petite famille au musée de la photographie de Charleroi

pour la visite entre autre des photos de Witkin. Cela me rappelle d’aller photographier

la carcasse d’os qui jonche le sol à l’entrée des bois de Fanzel. Dépôt clandestin

surprenant qui hier avait titillé mes narines par son odeur doucereuse de cadavre.


Lundi 8 février:

Hier, le Moniteur a publié l’arrêté royal qui interdit l’emploi des écharpes, foulards

et bandanas comme moyens de protection contre le Coronavirus. Dommage,

nous ne croiserons plus les Daltons dans les rayons des grands magasins.

Mercredi 10 février:

Didier en déposant Alice devant l’école de son amie constate qu’elles se font la bise

avec le masque. Ah, la chipie qui ne respecte pas la distance d’un mètre cinquante

avec ses copines et refuse un bisou à sa Mamy.

Paola a mordu au gin rami, battant ta maman sans vergogne en lui avouant

que je lui ai donné un truc infaillible pour gagner. Géraldine s’en offusque.

Paola lui confesse qu’il s’agit de déplacer d’un pavé, la chaise sur laquelle on est assis. Géraldine s’en amuse, elle qui utilise souvent ce vieux truc familial pour faire revenir

la chance.

Samedi 13 février:

Nous avons passé une excellente soirée à jouer aux cartes avec un couple d’amis.

Et dire que nous sommes hors-la-loi chaque fois que nous cassons notre bulle.

La nouvelle comme quoi les voyages non essentiels restent interdits en dehors

des frontières de la Belgique jusqu’au 1er avril est parue très discrètement.

Dimanche 14 février:

Tonton André a 85 ans, il nous a ouvert sa maison alors que lui et Annie, son épouse,

ne voient plus leurs petits-enfants qu’à travers la fenêtre. Je lui dépose le travail

sur les Bonmariage que j’ai imprimé et qu’il se réjouit de lire. C’est le plus vieux

de la fratrie de douze, ses remarques et anecdotes m’intéressent au plus haut point,

d’autant plus qu’il a eu une vie atypique: né en 1936, il sera ordonné prêtre en 1959

et se mariera en 1970. C’est une personne très posée, philosophe et fin scrutateur

de la vie sociale dans son village.

Quentin Dujardin, un guitariste que nous apprécions beaucoup, a donné un concert

dans une église devant une quinzaine de personnes masquées et séparées

par un mètre cinquante. Or, les églises ne sont ouvertes que pour le culte

et tous concerts interdits. La police est intervenue et a interrompu le spectacle.

Quentin risque une amende de 4.000€ et chaque spectateur, une de 250€.

Dans quel monde on vit!

Lundi 15 février:

La semaine passée a été glaciale, des températures nocturnes de moins 15°,

un ciel bleu, un soleil assourdissant et des nappes d’eau au fond des prés

transformées en patinoires.

La visite des musées est la seule occupation familiale encore accessible

pendant ces vacances de carnaval. Nous voulions visiter avec les enfants

l’expo sur Andy Warhol à liège mais tout est complet pour cette semaine.

Vendredi 18 février:

Nos hôtes ont découvert nos guides de voyage et me parlent de l’Arménie

et de la Géorgie où ils aimeraient aller. Et vous me disent-ils?

Quel est votre prochain voyage? Je suis bien en peine de leur répondre.

Depuis le confinement, nous n’avons plus aucun projet d’expédition,

nous qui en avions toujours dix d’avance: L’Iran à moto, le mariage de Luis au Vénézuela, saluer Jean-Francois et Louise au Canada, Michaël en Irlande, Patrick en Corse,

Angelica à Brême, découvrir Naples et la Norvège….


Dimanche 20 février:

Ce WE, les grues cendrées ont envahi le ciel se dirigeant vers le Nord beaucoup

plus tôt que d’habitude. Tout comme nous, elles profitent des courants d’air chaud. Dimanche dernier, on patinait sur la glace, aujourd’hui, nous prenons l’apéro au jardin

et la Côte belge est noire de monde. La semaine de congé qui vient de se terminer

a, elle aussi, été appréciée par les vacanciers venus nombreux en Ardenne.

Les grandes gîtes restant toujours fermés. La bulle familiale plus une personne

est toujours en vigueur mais les groupes que je croise en forêt la dépasse souvent.

Tous les carnavals sont annulés.

Vendredi 26 février:

Le scandale Avrox rebondit à nouveau. Ces masques commandés par l’armée belge au printemps dernier ne répondaient pas au cahier des charges et avaient été livrés en retard. De plus, ce marché public avait lésé des soumissionnaires belges. Aujourd’hui,

le Ministère de la Santé nous recommande de ne plus les porter car ils contiennent

des traces de métaux toxiques non signalés par le vendeur. L’Etat nous a exhortés

à porter un masque qu’à présent nous devons jeter à la poubelle.

Cela ne va pas conforter la confiance en nos gouvernants.

Contre toute attente, le comité de concertation - CODECO - de ce jour, n’a pas lâché de lest, les hospitalisations repartant subitement à la hausse. Par contre le couvre-feu wallon

va s’aligner sur le flamand et passer de minuit à 5:00, celui de Bruxelles restant

de 22:00 à 6:00. Dans un pays où l’Union fait la force, le devise est rarement respectée.

Les deux cousines passent de nouveau le WE chez nous, toujours en chambre d’hôtes.

Le soir, nous jouons une partie de 21 ou Black Jack, Paola trouve incongru de jouer

pour de l’argent, elle qui lit déjà Amélie Nothomb et le portrait de Dorian Gray.

Toi, petit jardinier, tu remplis l’arrosoir dans ma grande tine, tu pars asperger les parterres

et accessoirement tes pieds puis tu te mires dans l’eau, penchant la tête jusqu’à mouiller

tes cheveux en éclatant de rire.

Samedi 27 février:

Je suis retenue pour le concours photo de la grande forêt de Saint-Hubert.

Je dois défendre mon projet sur la couleur, intitulé " Brun", par une vidéo conférence

puisque toute réunion est interdite. Je ne serai pas sélectionnée pour l’exposition finale,

je le comprends car mes clichés ne sont pas assez ‹ INSTAGRAM-ables »,

ils sont trop conceptuels. Ce n’est pas grave, l’essentiel est de participer et

d’avoir un moteur pour lancer ma créativité.

Dimanche 28 février:

Après la lecture de l’interview de David van Reybrouck, historien, auteur de trois superbes romans: Congo, Fléau et Zinc, qui affirme que nous sommes en train de coloniser le futur

de nos enfants comme d’autres ont colonisé l’Afrique ou l’Indonésie, nous nous posons

la question de savoir ce que nous pouvons encore faire et en parlons avec ta soeur et Lucie. Pouvons-nous encore voyager? Oui, nous répondent-elles, car nous ne voulons pas vous priver de ce que nous espérons également pouvoir faire plus tard en toute liberté.

Nous vivons avec un sentiment de culpabilité permanent entretenu par les médias et trop négligé par les politiques.

Pendant ce temps, Félix se déguise en Dyonisos et passe son temps à dessiner.


Après « Le poids du monde », je viens de terminer « Ce lien entre nous » de David Joy comme une antique tragédie où la vengeance est cruellement humaine. Maintenant,

je retourne dans la « Montagne magique » de Thomas Mann, sur l’autre rive du siècle,

avant que ce dernier ne déchaine toute sa violence.

Lundi 1er mars:

Le WE, je croise pas mal de monde dans les bois: marcheurs et vététistes.

Mais dès le lundi, je m’y retrouve seule avec mon ombre, calquant mon pas sur le sien.

Les métiers de contact: masseurs, esthéticiennes, tatoueurs peuvent recommencer

à travailler.

Jeudi 4 mars:

Pour la première fois, le Pape François s’est rendu en Irak où vit une communauté

de 400.000 fidèles qui vingt ans plus tôt en comptait plus d’un million et demi.

Il y a une douzaine d’années, j’avais reçu Benita, une Chrétienne du pays voisin, l’Iran.

Avec sa mère, elle parlait une langue étrange: " C’est de l’assyrien" me dit-elle,

"nous avons fui notre pays après la chute du Shah pour nous réfugier aux USA

où ma tante Alice habitait déjà. C’est grâce à elle que nous sommes chez toi aujourd’hui,

car ta maison d’hôtes porte le même prénom". Hasard de la vie qui m’a fait rencontrer

une personne au parcours singulier: adolescente, elle quitte l’Iran et se retrouve

aux USA où elle restera cinq sans ses parents retournant au pays pour vendre leur maison

et empêchés de le quitter à cause de la guerre irako-iranienne. A 18 ans, elle part comme jeune fille au pair à Paris, y reste deux ans puis rentre aux Etats-Unis pour suivre

un cursus universitaire. Son diplôme en poche, elle revient en Europe dont elle avait

la nostalgie et restera une dizaine d’années à travailler à Bruxelles. Depuis que sa maman est décédée, elle est rentrée en Californie pour s’occuper de son père.

Vendredi 5 mars:

Le CODECO du jour ne nous libère pas du tout. A l’intérieur toujours la bulle familiale

plus une personne, à l’extérieur des groupes de dix avec port du masque

et distanciation seront de nouveau autorisés.

Dimanche 7 mars:

De la chambre, j’entends des footballeurs sur le terrain situé sur l’autre rive, un bruit

que j’avais oublié. Les cris de ces hors-la-loi et des pneus qui crissent

sur le gravier me réchauffent le coeur.

Avant de déguster une délicieuse glace chez A Cortina dans les courants d’air polaires

de la rue des Guillemins, nous avons visité l’exposition dédiée à Andy Warhol qui se tient

au musée de la Boverie. La police quadrillait les allées et les entrées du parc. Mercredi dernier, 3.000 personnes s’y étaient donné rendez-vous, squattant le lieu comme dans

un festival. Ces jeunes en ont marre, ils n’ont plus d’activité et de vie sociale, ils montraient ains leur ras-le-bol. En franchissant, la Belle liégeoise, la nouvelle passerelle qui enjambe

la Meuse, tu as salué les policiers, tes collègues comme tu dis!

Comme beaucoup de gamins, une sirène de pompier ou de voiture de police attire toujours ton attention.

Jeudi dernier, c’est à Louvain-la-neuve que nous avions visité le musée de l’Université.

La ville était lugubre sous la pluie, vide de tous ses étudiants, froide comme le béton qui l’habille.

On vient de me raconter l’histoire d’un petit café de village qui quand les rideaux sont fermés est ouvert et quand les rideaux sont ouverts est fermé. Ne me torturez-pas je n’avouerai pas mes sources! Parrain Paul m’a toujours certifié que l’esprit celte d’indépendance habitait toujours les habitants de notre région. Je constate qu’il en reste un petit pourcentage dans

le sang de ces irréductibles Gaulois.

Lundi 8 mars:

Après de nombreux couacs dans la vaccination: rupture de stock, centres de vaccination vides, invitations arrivant en retard ou adressées à la mauvaise personne, problèmes informatiques, la phase 1B commence aujourd’hui avec la vaccination des plus de 65 ans, une population qui risque de développer une forme plus grave d’infection par le COVID .

La phase 1A, visait les résidents et le personnel des maisons de repos, les institutions pour personnes en situation de handicap et les professionnels d’aide et de soins de santé.

Mardi 9 mars:

Tu as passé la nuit dernière chez nous et je suis sur les genoux. J’ai envoyé un texto à ta maman pour lui demander ou se trouvaient les piles qui te font fonctionner.

Le cercle culturel de Durbuy organise une expo sur les masques. Je viens d’y déposer

mes deux panneaux. Pas sûr que l’on pourra la visiter, aussi, ont-ils programmé de petites capsules vidéo pour la visiter virtuellement.


Le titre est : In memoriam iuventutis nostrae




Mercredi 10 mars:

Nous devrions être à Rotterdam. Fin décembre, nous avions réservé un billet de train

et pensions y passer trois jours mais les mesures contre le COVID nous clouent encore

et toujours à la maison.

Samedi 13 mars:

Voici un an que nous sommes séquestrés par le virus. Au début, cela devait durer trois semaines et aujourd’hui, nous n’apercevons toujours pas la fin du tunnel.

Tous les soirs, nous étions rivés à notre écran pour dévorer le JT. A présent, c'est bien fini. Nous ne visionnons plus que des longs métrages préalablement enregistrés.

Paola et Lucie ont encore passé le WE à la maison. Depuis trois semaines, Lucie porte

un de mes vieux pull-overs qu’elle a retrouvé en fouillant le grenier. Chaque fois

que je la vois, elle a sur le dos, ce tricot brun aux losanges Burberry.


Mardi 14 mars:

Il y a une grosse polémique autour du vaccin AstraZeneca. De nombreux pays européens: l’Allemagne, l’Italie, la France, l’Espagne, l’Irlande, l’Islande et bien d’autres l’ont suspendu car il occasionnerait des thromboses. En Belgique, ne pas interrompre la vaccination a plus d’importance que d’attendre trois jours que l’OMS se positionne sur la dangerosité du produit que l’on inocule.

J’ai été obligée de te tenir tête toute la journée. Depuis, trois semaines, tu décides de tout. Par exemple, j’aimerais que tu manges ton risotto avant le dessert mais tu préfères te priver des deux.

Vendredi 19 mars:

Mamy a été vaccinée comme le Roi Albert et la Reine Paola l’ont été, hier après-midi, au palais du Heysel. A part la fatigue du voyage jusque Marche-en-Famenne, elle ne ressent aucun effet secondaire. C’est au WEX que se dresse le centre de vaccination pour notre région. C’est une opportunité financière pour ce centre d’expositions et de concerts qui ne travaille plus depuis des mois. Mamy a reçu le vaccin Pfizer comme avant elle, la majorité des résidents de maisons de repos où l’on constate une chute vertigineuse des contaminés, preuve de l’efficacité du vaccin.

Les chiffres de contamination remontent plus fort que prévu, Plusieurs pays européens reconfinent. On parle d'une possible troisième vague.

Samedi 20 mars:

Nos amis Iraniens viennent de nous souhaiter un bon Norouz. C’est le nouvel an perse.

Il y a quatre ans, nous les quittions dans la nuit de Chaharshanbe Suri, la Fête du Feu

dont l’origine, comme Norouz, remonte au zoroastrisme, la première religion monothéiste vieille de trois millénaires. Cette fête se passe la nuit du mardi avant Norouz. Nous avions sauté au-dessus des feux allumés dans la rue afin d’assurer la chance pour l’année à venir,

dansé sur la musique qui s’échappait des fenêtres et regardé les feux d’artifice

qui explosaient dans le ciel au milieu des lanternes de papier. Avant qu'au coeur de la nuit, nos hôtes iraniens ne nous raccompagnent à l’aéroport, en chantant à tue-tête, entassés

à sept dans une camionnette.


Dimanche 21 mars:

Fado vient de rentrer en Belgique après une visite à sa famille en Bosnie.

Il n’y a pas de confinement dans son pays d’origine. Tous les commerces sont ouverts,

les bars et restaurants doivent fermer à 23 heures. Le masque est obligatoire

dans les lieux publics fermés et dans les transports en commun.

Hier comme aujourd’hui, nous avons visité une expo. Nous sommes à présent obligés

de réserver notre créneau horaire. Dans la première visite, au cercle culturel de Marchin, nous étions quatre visiteurs. Comme tous les cafés ou salons de thé sont fermés, nous achetons un gâteau au chocolat dans une pâtisserie et le mangeons debout appuyé contre une façade, sans café et sans thé.


Mardi 23 mars:

Tu es tout heureux car Alice est venue chez nous réviser pour ses examens.

Elle devait changer d’air, fatiguée d’étudier dans la cuisine en compagnie de son papa

qui y télétravaille tous les jours.

Tu as passé ta journée dans le jardin. Tu remplis ta brouette comme un vrai jardinier en poussant le pied sur ta pelle. Tu tombes sans arrêt, saignes du nez, ramasses des coquards qui te laissent une demi-heure affalé dans mes bras.

Mercredi 24 mars:

Didier a recommencé a donner ses cours de français aux demandeurs d’asile. Mais le Codeco du jour a déjà stoppé cette brève amélioration. Tous les métiers de contact: coiffeurs, tatoueurs, esthéticiennes, masseurs qui avaient réouvert il y a six semaines, devront cessé toutes activités jusqu'au 26 avril. Les écoles allongent les vacances de Pâques d’une semaine. Les magasins non essentiels doivent fermer ou livrer à domicile.

Les fleuristes comme Emilie sont catalogués dans les métiers essentiels.

La bulle sociale extérieur qui venait de passer à dix personnes, retombe à quatre,

enfants de moins de douze ans non inclus.

Jeudi 25 mars:

Balade angoissante ce matin dans la forêt quand un hélicoptère de l’armée a survolé le bois en rase-motte, par cercles concentriques, une douzaine de fois. Me cherchait-il?

Et s’il me capture, dois-je avouer que je fais cette balade trois fois par semaines depuis

un mois et demi pour prendre la photo d’un tas de viande en décomposition?

C’est étonnant la mémoire! Chaque jour, après le diner, je fais les deux mots croisés

et le sudoku de mon quotidien. Aujourd’hui, je devais trouver la définition en huit lettres

de « retenus par les dents » et zoup, j’ai pensé à papa et au saut en parachute, cadeau

de ses septante ans, qu’il n'avait effectué qu'un an plus tard car maman le lui interdisait.

Quand le parachute s’est ouvert, tout le contenu de son estomac est remonté dans la bouche. De peur de perdre son dentier, il avait tout « retenu entre les dents ».

A peine atterri, il a craché le contenu de ses mâchoires, ratelier compris, en pensant

que les moments que l’on attend le plus ne sont pas toujours à la hauteur de nos espoirs.

Vendredi 26 mars:

Alice est heureuse d’arrêter l’école une semaine plus tôt que prévu. Elle vient de trouver

un tutoriel pour se confectionner un pantalon. C’est une créative, très douée de ses mains qui se lance aussi dans le macramé, cet artisanat que je pratiquais il y a quarante ans.

Et oui, le kitsch revient à l'honneur!

Dimanche 28 mars:

Quelle mauvaise idée j’ai eu d’aller à vélo jusque Durbuy. Il y a un monde dingue

sur le parcours et dans la ville.

Mardi 30 mars:

Tu es venu hier avec Lucie et Paola. J’adore quand tu la serres dans tes petits bras

et que tu lui dis: "Je t’aime, Paola". Tu as bien profité du jardin ensoleillé.

Le thermomètre est monté à 23,8°C, encore un record de température battu

pour un mois de mars. Par ce temps splendide, les Belges désoeuvrés se sont rués vers la Mer du Nord, engendrant des bouchons dans les gares. Le scénario parfait pour contaminer

la population que l’on voudrait garder confinée à la maison.

Le tribunal de première instance de Bruxelles vient de condamner l’Etat belge qui gère

la pandémie depuis des mois via des arrêtés ministériels et sans légiférer. Dans un état démocratique ces sanctions et restrictions sont de l’autorité parlementaire. Cette pratique illégale va mettre de l’eau au moulin de ceux qui portaient plainte au tribunal contre les sanctions financières et les fermetures, les estimant abusives.

1er avril:

Emilie m’annonce que tu viens de te casser le bras en tombant du mur du jardin

puis m'avoue que c’est un poisson d’avril. Pfff, quel soulagement mais quelle andouille,

cette fille!

Dehors, dehors, dehors, avait dit le premier ministre lors du dernier CODECO.

C’est ce qu’a fait une ado (tu peux me torturer, je ne donnerai pas son nom!) en invitant

trois copines à loger dans le jardin. Leur discrétion nocturne a réveillé les parents.

Elles étaient quand même moins exubérantes que les 2.000 jeunes du bois de la Cambre qui se sont fait expulser par la police, équipée d’auto-pompes, gaz lacrymogène, hélico

et chevaux.

Lundi de Pâques:

Un couple d’italiens a passé le WE dans notre maison. Empêchés de rentrer au pays

suite à l’interdiction des voyages non essentiels vers l’étranger, ils m’avouent s’être sentis chez nous comme dans leurs familles italiennes qu'ils auraient tellement aimé revoir.

Mardi 6 avril:

Didier tente depuis 9:00 du matin de s’inscrire sur le nouveau site QVAX qui liste les réservistes pour les vaccins Covid non utilisés. Le centre nous contactera et nous aurons une demie-heure pour réagir à leur appel et se présenter pour se faire vacciner.

La priorité sera donné aux plus âgés. Il y a 114.330 personnes qui attendent avant lui.

Il arrivera à s’inscrire vers 17h30. Le succès de cette nouvelle application est phénoménale.

A l'extérieur, voici deux jours que la neige recouvre les buissons fleuris des pruneliers.

Jeudi 8 avril:

Revoici le soleil et les températures clémentes.

Lucie et Paola logent de nouveau pour quelques jours. Elles papotent jusqu’à minuit passé, rechignent quand nous allons marcher, jouent avec plaisir au 21 et passent beaucoup trop de temps, à mon goût, sur leur GSM.

Mamy est partie pour le deuxième et dernier vaccin. Le pharmacien me signale qu’un suivi des effets secondaires de ce dernier est installé sur leur programme afin d’alerter les autorités en cas de problèmes récurrents.


Vendredi 9 avril:

Le collectif Wallonie Horeca veut réouvrir le 1er mai quelles que soient les prochaines directives du Codeco. Ils veulent recommencer à travailler avec un protocole adapté

pour les clients, les fournisseurs et leur personnel. Une petite vidéo circule sur You tube, exhortant tous les cafetiers et restaurateurs à les suivre.


D’autres secteurs - comme le culturel - continuent à se rebiffer. Il n’est pas normal

que les salles de spectacle soient vides alors que les trains pour la mer sont bondés.

Ton papa est soulagé. Fin de semaine dernière, à l’école, il a travaillé avec une personne positive au Covid. Les tests étant impossibles les jours fériés: Dimanche et lundi de Pâques,

il a du attendre mardi pour un premier test et aujourd’hui pour le second qui s’avèrera négatif.

Dimanche 11 avril:

Deux jours de pluie sans discontinuer, en balade, je croise de rares marcheurs harnachés comme des marins-pêcheurs. Deux heures et demi de marche me vide l’esprit.

J'ai appris aujourd'hui que cette immersion dans la forêt s’appelle sylvothérapie.

Je suis un peu comme Mr Jourdain, je la pratique depuis toujours sans le savoir.

Lucie et Paola sont restées quatre jours à la maison. La première est taiseuse mais

à l’écoute. La seconde est féministe jusqu’au bout des ongles et réagit à la moindre provocation de son grand-père. Dans mes lectures actuelles, j’aborde également le sujet: "Intimité" d’Alice Ferney, "les impatientes" de Djaïli Amadou Amal ou "KingKong théorie"

de Virgine Despentes. Nous discutons pas mal entre grand-mère et petites-filles,

nos époques réciproques sont incroyablement éloignées et pourtant il reste encore

tellement à faire pour changer les mentalités.

Elles ont créé un transfer sur leur amitié et leur fascination pour l'Angleterre

et l'ont imprimé sur un T-shirt.


Lundi 12 avril:

Réunion ce soir avec quelques membres d’un comité: bises à l’accueil et pas de masques. Ici, ce n’est pas la désobéissance qui gagne du terrain mais des personnes pour

qui le contact humain est important et qui ne regardent pas l’autre comme

un porteur de problèmes, ce que la société actuelle tend pourtant à instaurer.

Mardi 13 avril:

Victor nous a préparé les coquilles Saint-Jacques qu’Emilie avait ramenées de son WE

à la mer. Il les a déclinées de cinq façons différentes. Il suit les pas de Guillaume, son grand frère, qui avait réclamé une cuisinière comme jouet pour Saint-Nicolas.

Mercredi 14 avril:

Didier vient déjà de recevoir son « invitation officielle à la vaccination ».

Comme le centre de Marche-en-Famenne utilise l’Astra Zeneca avec lequel les effets secondaires et les risques de thrombose sont plus fréquents, il a préféré prendre RV

à Huy pour recevoir le Pfizzer.

Le temps d’attente entre les deux doses est également plus court. A ce jour 20,2% de la population a reçu sa première dose et 6,8% la totalité du vaccin.


Jeudi 15 avril:

Belle surprise dans le courrier ce matin, mon triptyque sur le printemps a été publié

par le magazine français « Chasseur d’images ».


"Alice 14 ans, Paola 12 ans, Lucie 12 ans. Les tons pastel symbolisent la douceur et l'innocence, les fleurs expriment l'éclosion de la vie à venir."

Nouveau Codeco hier après-midi qui fait gronder l’Horeca. Beaucoup de restaurateurs espéraient rouvrir le 1er mai mais seules les terrasses le pourront et seulement le samedi suivant. Pour l’intérieur, ce sera en juin si la situation dans les hôpitaux le permet.

Le problème est que seulement 20% des restaurants possèdent une terrasse.

Le collectif des irréductibles Liégeois continue à faire front et annonce une ouverture

le 1er mai. Le bourgmestre n'enverra pas la police contrôler les gens qui boiront un verre

en terrasse. La ministre de l’intérieur exhorte cependant les mayeurs à faire respecter la loi.


Samedi 17 avril:

Didier a passé la matinée à chercher des morilles, toujours sans succès!

Dimanche 18 avril:

À propos du Covid, le problème qui bloque tout le pays est la diminution des lits d’hôpitaux aux soins intensifs. À Arlon lors de la première vague, il y en avait 20, à présent,

il n’y en a plus que 14, à cause de la pénibilité d’un travail très mal rémunéré,

les infirmières démissionnent pour se diriger vers des boulots où elles seront mieux payées comme au Grand Duché du Luxembourg ou valorisées sans avoir à prester les WE et les pauses.

Le leitmotiv des politiques est que nous devons tout cesser car les services des soins intensifs sont débordés. Ne serait-il pas plus judicieux de les réorganiser et de les revaloriser?

Lundi 19 avril:

La citerne d’eau de 10.000 litres est déjà vide et nous ne sommes qu’en avril!

Vendredi 23 avril:

Hier, Didier a reçu son vaccin. A présent, recru de fatigue, il dort depuis midi.

La campagne de vaccination s’accélère, j’ai également reçu ma convocation.

Je serai vaccinée avec le Pfizer, vaccin américain qui répond à toutes les attentes

puisqu’il est efficace, sûr et que les livraisons sont régulières au contraire de l’AstraZeneca. Le premier mise sur la technologie de l’ARN messager, le deuxième sur les vaccins à adénovirus qui engendrent pas mal d’effets secondaires indésirables.

Le secteur de la Culture est déçu du Codeco de ce 23 avril qui ne lui donne

aucune vision précise pour une réouverture future. Depuis plusieurs semaines,

le mouvement « Still standing for culture » mobilise le monde du spectacle.

Il fait savoir que 80 groupes s’apprêtent à braver entre le 1er et le 8 mai, l’interdiction

d’ouvrir les lieux de théâtre et de représentation.

Voici, l’annonce que je viens de recevoir du Théâtre de Liège qui propose trois spectacles

le 1er mai:


Cher public,

Nous ouvrons parce que nous voulons sortir de cette logique destructrice qui sacrifie les activités porteuses de sens, de débat et de lien social, et les relègue au rang de variables d'ajustement [...] Parce que nous répétons depuis des mois, sans être entendus, qu'il faut arrêter d'opposer les secteurs et que toutes les activités humaines doivent pouvoir reprendre de manière proportionnelle face à la situation sanitaire.*


Rendez-vous le 1er mai !


Samedi 24 avril:

Cette semaine, tu viens passé le WE chez nous. Nous le commençons avec une balade dans les bois. Tu fonces sur ta draisine que tu appelles encore et toujours « ma moto », allongeant les jambes de part et d’autre, comme un échasseur, utilisant tes nouvelles baskets bleu Bic « Lego » comme des freins. Avec cet engin, tu avales les km pendant

que ta maman et moi te suivons à grands pas. Tu entretiens notre bonne humeur

et répètes comme un mantra : « Arrête de « me » moquer de moi ». Nous n’en avions nullement l’intention mais plutôt l’envie de te couvrir de bisous.

Lundi 26 avril:

En Inde, l’épidémie est en train d’exploser. On parle d'un variant indien plus virulent.

Pour contrer la mutation du virus, il faudrait que la vaccination s'accélère partout dans le monde. Or, les pays riches ont tendance à l’égoïsme vaccinal en achetant tous les stocks

de vaccin disponibles et le système COVAX qui doit permettre aux pays pauvres d’acquérir le vaccin a difficile de démarrer.

Mercredi 28 avril:

Ce matin, aux cours de français, Didier avait quatre nouveaux Erythréens

dont il avait des difficultés à prononcer le nom, un Kurde venant de Turquie,

une Iranienne et un Afghan très sympa, en Belgique depuis un an,

qui l'aidait à donner les explications aux autres élèves. Didier leur apprend à se présenter,

à dire "bonjour", "comment ça va", "je m’appelle", "je viens de"… Son but est de donner cours avec humour et bienveillance pour que ses élèves oublient pendant quelques heures leurs difficultés d’intégration et leur parcours de vie souvent chaotique.

Jeudi 29 avril:

Hmmm, l’odeur de pétrichor envahit mes narines. Je viens de découvrir ce nouveau mot

qui décrit l’odeur caractéristique dégagée par l’atmosphère aux premières gouttes de pluie survenant après une longue période de sécheresse. Ce parfum m’a toujours rasséréné.

Tu te souviens du guitariste Quentin Dujardin qui avait été arrêté par la police le 14 février parce qu’il donnait un concert dans une église devant quinze personnes. La cour d’appel vient de lui donner raison estimant qu’il subissait un régime discriminatoire alors

que les prêtres pouvaient dire la messe devant ce même nombre de fidèles.

Alain Moreau, marionnettiste du Tof Théâtre a subi les mêmes avanies. Avec beaucoup d’humour, il s’est présenté au commissariat avec Maître Léon, une marionnette à robe d’avocat, ce dernier a fait remarquer que la crise était gérée depuis des mois à coups d’arrêtés et non de lois, qu’aucun cluster n’a jamais été constaté dans les salles de spectacle et qu’il n’avait jamais été démontré scientifiquement qu’un artiste était plus contaminant qu’un vendeur de chaussettes. J’adore cet esprit de révolte artistique!


Samedi 1er mai:

A Bruxelles, un avis de Boum N°2 dans le Bois de la Cambre (la première avait eu lieu

le 1er avril) avait été lancé. Cette manifestation était illégale mais de nombreux curieux, fêtards, manifestants et autres revendicateurs étaient cependant présents.

Un déploiement important de police est arrivé sur le terrain repoussant puis finalement lançant l’assaut sur la foule à l’aide de gaz lacrymogènes et de quatre autopompes.

D’autres manifestations, ailleurs dans le pays, se sont déroulées dans le calme.

Quelques lieux culturels ont cependant rencontré des difficultés avec les forces de l'ordre.

Dimanche 2 mai:

J’ai refermé « les Téméraires » de Bart Van Loo, dix minutes avant d’entrer en gare

de Bruges. Pendant deux jours, je vais pister les traces des Ducs de Bourgogne

dans la vieille cité. Notre guesthouse est un bâtiment remarquable. Ce sont les anciens atelier et habitation d’un céramiste et maître-verrier du 19ième siècle: Samuel Coucke .

Tout l’intérieur est décoré en néo-gothique, style très prisé dans la ville à cette époque. Comme nous sommes les seuls hôtes, notre souper est servi dans la salle à manger.

Lundi 3 mai:

Pour mes 63 ans, les cloches de l’église Saint-Sauveur nous réveillent en douceur.

La ville est calme, aucun touriste, aucun café, nous peinons même à trouver un sandwich pour diner. Nous déambulons dans Bruges la morte, sous le soleil et dans un décor magnifique.

Mardi 4 mai:

C’est avec plaisir que nous revoyons les Memling de l’hôpital Saint-Jean et l’étonnante BD de la châsse de Sainte Ursule avant d’enfiler une portion de pâtes sur le parvis venteux

de l’église Notre-Dame puis de nous sauver de ces rues glaciales pour filer vers la gare

et prendre le premier train.


Mercredi 5 mai:

J’ai reçu, hier soir, la première dose du vaccin Pfizer et je n’ai fait aucune réaction.

La campagne de vaccination s’accélère, Olivier et Emilie qui sont de la génération

en-dessous de la mienne ont reçu leur convocation. Le comité de concertation

a conditionné la reprise des activités en intérieur à un niveau de 500 patients covid

aux soins intensifs. Ce lundi 3 mai, on en était encore à 825 lits occupés.

Si les cas continuent à diminuer comme à présent, nous devrions atteindre

les 500 dans la première quinzaine de juin.

Jeudi 6 mai:

Emilie a accueilli deux pèlerins de Saint-Jacques qui cherchaient un abri pour la nuit.

Ils ont logé dans le hangar du fond, aménagé avec fauteuils, feu de bois et plancher

pour dormir. Le très jeune duo - frère et soeur - sont repartis avec une des nombreuses coquilles Saint-Jacques qui trainent dans le jardin et que les enfants avaient dédicacée.

Ces derniers espèrent que les deux marcheurs la déposeront dans la cathédrale de Santiago de Compostella, en Galice. Avec Didier, nous y sommes allés à moto.

Lors de ce périple, nous avions croisé un jeune couple d’américains qui partis

du Puy-en-Velay faisait le pèlerinage en tandem comme voyage de noces.

Une fourgonnette les suivait avec l’intendance et les repas.

Vendredi 7 mai:

Au Vénézuela, le papa de Luis est mort à 74 ans du Covid. En Equateur,

Alexandra m’écrit que le pays ne compte pas assez de vaccins

et qu’il y a une très mauvaise organisation.

Aux Etats-Unis, Joe Biden, le président vient de demander la levée des brevets

sur la production des vaccins. Une mesure extraordinaire pour une pandémie

qui l’est tout autant. La levée des brevets est un premier pas qui ne suffira pas

si un partage des connaissances pour produire les vaccins et la construction d’usines

dans les pays pauvres ne sont pas envisagés.

C’est le WE de la fête des mères et j’ai de nouveau été aider Emilie au magasin.

J’ai énormément de plaisir à retrouver mes anciens clients. Ce sera de même

pour les acteurs de l’Horeca qui recommenceront demain en ouvrant uniquement

leur terrasse. Reprendre les gestes de fleuriste, c’est un peu comme remonter sur un vélo. Cela ne s’oublie pas et ça courbature tout autant! .

Samedi 8 mai:

Paola est en quarantaine pour une semaine. Didier quant à lui est parti boire un verre

chez Jean-Mi qui a rouvert son café. Le temps est maussade mais demain sera splendide.

Cette possibilité pour les restaurants de n’ouvrir que les terrasses est très difficile à gérer

car elle dépend de la météo et de la possibilité d'installer une terrasse. C’est pourquoi beaucoup resteront fermés et attendront les prochaines mesures du CODECO.

Dimanche 9 mai:

Pendant que nous faisions une partie de cartes avec ta maman, tu as été pêcher

avec Didier. La deuxième truite que vous avez capturée avait un chabot dans la gueule.

Ton petit doigt s'est tendu pour dire que ce n’était pas bien de manger un petit poisson.


Lundi 10 mai:

Alice recommence l’école à temps plein avec des pieds de plomb.


Mardi 11 mai:

Emilie a été vaccinée.

Pour la première fois, le CODECO du jour a donné un calendrier de déconfinement

qui commencera le 9 juin si les chiffres des contaminations continuent à diminuer.

Le premier ministre martelant que nous ne pouvions y arriver qu’en continuant

la vaccination. Celle-ci n’est pas obligatoire mais avec le test PCR, elle risque

d’être demandée pour accéder à des évènements de grande envergure.

Beaucoup de mes amis n’ont jamais porté le masque et refusent de se faire vacciner.

Pour ma part, comme les droits de toute la population sont rudement rabotés,

j’estime que ma liberté individuelle doit passer après la liberté de la communauté.

Aussi pour espérer retrouver une vie sans barrières et voyager cet été, j’ai fait le choix

de me faire vacciner.


Mercredi 12 mai:

Ce matin, j’ai constaté que la pandémie était en nette régression quand à la boulangerie,

le panier dans lequel nous devions déposer notre argent avant qu’il soit désinfecté

puis réintroduit dans le tiroir caisse, avait été enlevé.

Pour mes tisanes, je viens d’aller cueillir des feuilles de ronces et de framboisier.

Je suis redescendue du petit chemin merdique dans un nuage de graines de pissenlit.

Quel chance de vivre à la campagne!

Vendredi 14 mai:

Victor est passé à la maison pour une séance photo. Il doit rendre son CV dimanche soir pour postuler au Négresco à Nice. Il est très fier d’avoir obtenu le meilleur stage

de son année. Il ne devra pas oublier de mentionner qu’il cultive un potager.


Après 48 heures, Paola a enfin reçu un message comme quoi elle était négative au Covid. Avec Lucie, elle a l’intention de dormir dans la tente plantée au fond du jardin.

Elles l’ont agrémentée d’une guirlande lumineuse du plus bel effet. Ā 22:00 heures,

la première est déjà rentrée car la pluie l’empêchait de dormir. Pfft, quelle aventurière

de pacotille. La deuxième restée seule et frigorifiée, le fera vers 3:00. Je la découvrirai

au petit matin, les jambes pendant du petit canapé deux places.

Cette après-midi, nous sommes passés chez Khalid qui a planté sur son nouveau terrain, une centaine de pied de vignes et un immense carré de patates. De plus en plus de jeunes, suivent les préceptes de Voltaire qui dans Candide, conseillait de "cultiver notre jardin".

La maman de Khalid habite Kénitra, au Maroc. Elle est bloquée chez son fils, en Belgique,

depuis un an. Le Maroc est confiné jusqu’au 10 juin, elle a réservé son billet d’avion

pour deux jours plus tard en espérant pouvoir enfin rentrer au pays.

Elle avait quitté sa maison en décembre 2019 pour visiter sa fille aux USA, six mois plus tard, elle partait rejoindre son fils en Belgique.

Samedi 15 mai:

Tante Alice a 80 ans. C’est dans la maison de ses parents que nous vivons. Elle est située

le long de l’Aisne. Rivière sur laquelle mon arrière-grand-père était meunier, en contrebas

de Heyd, où la grand-mère de Didier est née. Cette rivière se jette dans l'Ourthe,

quelques kilomètres plus bas, à Bomal, où vivait la famille paternel de Didier

et passait non loin de Deux-Rys dont sa branche maternelle est issue.

C’est peu dire que nous avons chaussé nos racines dans cette habitation,.

Dimanche 16 mai:

Alice a quinze ans. Pour l’occasion, je lui ai offert un bracelet mais pas de chance,

elle préfère recevoir la même bague que son Pépère. Lui la porte à l’annulaire,

elle, à l’index.

Le modèle exclusif a été créé par Alain Lovenberg, maître-graveur, en s’inspirant

des entrelacs celtiques du calice d’Ardagh.

Alice a recommencé sans problème son temps plein à l’école d’autant plus

que cette année, les examens de fin d’année sont annulés.

Mardi 18 mai:

Tu as passé la nuit dernière à la maison. Le soir, je monte avec toi et lis dans le lit

pendant que tu fais l’arsouille, dormant sur mon sein, en savourant « ce coussin

si moelleux ». Tu as un très bon vocabulaire même si la prononciation sans

tes deux incisives te fait chambouler les mots : difficile de comprendre « biscuit »

quand tu prononces « bifi ».

Jeudi 20 mai:

Rincé par la pluie abondante de ces derniers jours, l’air est vif, tonique et lumineux.

La campagne respire la quiétude. Dans les champs, les pousses pointent en rangs serrés, alignées comme des soldats à la parade. Les vaches auront de quoi brouter

et les fermiers de quoi faucher car leurs réserves sont au plus bas.

Maman a été rendre visite à sa vieille amie Thérèse, résidant en maison de repos.

Cette dernière a droit à deux visiteurs qui peuvent changer tous les quinze jours.

Quant à Roseline, en séjour dans une maison de soins, elle peut avoir des visites

d’une vingtaine de minutes, derrière un écran. Toutes embrassades étant interdites.

Juste une impression de prison!


Vendredi 21 mai:

Premier resto depuis plus de six mois. Tant qu’à faire, nous y sommes allés deux fois

sur la journée. Un italien à Bruxelles pour une délicieuse pâte à la norma, sur un trottoir venteux de la rue haute et un plus chic à Durbuy, sur une terrasse chauffée et protégée.

Dans la capitale, au Train World Museum, pendant la visite de l’expo sur la construction

de la ligne ferroviaire Pékin-Hankou ( l'actuelle Wuhan, ville dans laquelle la pandémie

est apparue fin 2019 ), j’ai été interpellée par un commentaire de Henry Kissinger.

Il notait que la Chine pouvait se vanter d’avoir eu pendant des siècles l’économie

la plus productive du monde et la zone d’échanges la plus peuplée. Avant la révolution industrielle et durant dix-huit des vingt derniers siècles, la part de la Chine dans le PIB mondial a été supérieur à celle de toute société occidentale. En 1820, elle réalisait

encore plus de 30% du PIB mondial.

C'est interpellant quand on pense aux petits Occidentaux qui sont effrayés par la force commerciale chinoise actuelle.

Je viens de terminer « Apeirogon », de Column Mac Cann, un texte touffu et émouvant

sur la paix entre la Palestine et Israël, qui pose des questions importantes : qui occupe qui? Et qui est la victime dans ce conflit qui ces derniers jours, a encore fait de nombreux morts?

Freud y répond à Einstein que tout ce qui créé des liens émotionnels entre les êtres humains combat inévitablement la guerre. Ce qu’il fallait viser était un sentiment de communauté

et une mythologie des instincts.

Le nombre fatidique des 500 hospitalisés est atteint et continue à baisser comme

tous les indicateurs. C’était le chiffre clé exigé par le CODECO pour lancer le déconfinement du 9 juin. La vaccination progresse à grands pas, 48,70% de la population de plus de 18 ans a déjà reçu le premier vaccin et 20%, dont Didier, sont totalement vaccinés.


Samedi 29 mai:

Je suis montée au grenier avec Lucie et Paola qui passent encore le WE à la maison.

Nous sommes redescendues avec deux mannes de vêtements des années septante

et une nuée de souvenirs dont une boite à cigares remplie de lettres et mon journal d’adolescente. Mes aspirations étaient déjà les mêmes qu’aujourd’hui, j’écrivais :

« J’aimerais tant vivre au grand air, dans les bois, la campagne, vivre libre, sans bruit,

au soleil ou alors faire le TOUR DU MONDE. Je ne voudrais pas être très riche

mais avoir un peu d’argent, un véhicule, soit une moto ou même, un bateau,

mais ce serait trop « chouette » si j’en avais un. Je travaillerais dans une ville,

de quoi gagner assez pour aller un peu plus loin, vers d’autres pays, d’autres horizons, d’autres visages, même si je devais prendre le temps, je le ferais, je pourrais faire

des articles, des documentaires, des photos. Je vais essayer de m’appliquer dans la photo, seulement je n’y comprends pas grand chose. "


Premier jour de soleil depuis deux semaines. Les terrasses et l’Horeca vont enfin pouvoir

en profiter. Dans les prés, les faucheuses s’activent. Ca sent l’herbe fraîche et je me réjouis de savourer l’odeur du foin qui sèche au soleil. Les hôtes du WE étaient ravis de pouvoir déjeuner au jardin. Les Luxembourgeois s’étonnaient que nos salles de cinéma et concerts soient toujours fermées. Ce sont les premiers internationaux qui reviennent chez nous depuis des mois. Mes connaissances recommencent à voyager : Francoise est rentrée d’Allemagne pour enfin voir ses parents, Irène est en Toscane, Andrée part à Paris,

Monique testée positive devra attendre la fin de sa quarantaine pour partir en France,

qui est toujours cataloguée en rouge, avec un couvre-feu jusque 21h00.


Jeudi 3 juin:

Nous avions prévu de faire une randonnée vélo itinérante, avec nos sacs à dos, en logeant chez des amis. Suite aux mauvaises prévisions météo - on annonce de 80 à 100% d’averses - nous avons revu nos prétentions à la baisse. Nous partirons pour des balades

en boucle. Comme de vrais touristes, habillés en jeans et bermudas de coton, nous commençons par casser la croute à Dinant, au bord de la Meuse avant de rouler sous

un soleil de plomb jusque Maredsous.

Le repas du soir pris à Namur, sur la péniche de mon cousin jouxtant celle où nous dormons, est un vrai plaisir.

Vendredi 4 juin:

Les reflets de l’eau miroitent sur les parois de la cabine narguant les 100% de pluie prévue pour aujourd’hui. Nous enfourchons nos vélos à Tamines, traversons la ville de Charleroi

en longeant la Sambre puis continuons par l’ancien tracé du vicinal qui reliait Jumet, Gilly

et Châtelet. Les graminées qui balancent leur tête, les coquelicots et les églantiers

qui s’étalent au soleil, les polygonums qui nous font une haie d’honneur laissent à la sortie de Charleroi la place à la poussière, aux bruits, au fer et au béton des sites industriels

qui la caractérisent. Nous arrivons trempés à la voiture, les prévision météo qui annoncaient un orage, avaient vingt minutes d’avance!

Dimanche 6 juin:

Nous terminons notre périple entre Thuin et la frontière française, toujours au bord

de la Sambre. La balade est magnifique et nous fait revenir par Binche. Hier, le temps

était tellement maussade que nous n’avons pas sorti les bicyclettes.

Mercredi 9 juin:

Je suis un peu patraque suite à la deuxième dose de vaccin reçue hier et je monte faire

la sieste avec toi. Á partir d’aujourd’hui, les restaurants peuvent rouvrir en intérieur

jusque 23:00. Les lieux culturels, les cinémas et les salles de sport sont de nouveau accessibles tout comme mon cours de Qi gong.

Nous avons invité nos cinq petits-enfants pour une semaine dans les Dolomites.

Ce voyage est prévu depuis neuf mois. Nous pensions sincèrement être libérés plus tôt

de cette pandémie et pouvoir partir sans restrictions. Ta maman devait nous accompagner mais les mesures pour voyager étant trop contraignantes, elle a décidé ne pas nous accompagner. C’est dommage, nous aurions aimé réitérer le voyage en Angleterre de mars 2019 qui avait laissé à toute la famille de si beaux souvenirs.

A partir du moment où nous sommes vaccinés depuis 14 jours, nous pouvons voyager

sans faire de test PCR. Ceux-ci coutent un peu moins de 50,00€.


Je ne peux plus rien dire, entendre ou voir..

Photo réalisée avec Jeda


Jeudi 10 juin:

Pierre et Nadine vont se faire vacciner. Ils y étaient pourtant rétifs.

Les hôtes du jour sont encore angoissés par le Covid. Ils voulaient apporter leur linge de lit de peur d’être contaminés. Je les en ai dissuadé. Ceux du WE sont plus cool et ne portent plus le masque. Des mondes différents se côtoient.

Dimanche 13 juin:

Tu pars pêcher dans la rivière avec Didier et reviens en hurlant car tu as glissé du petit quai où tu t’étais installé avec ta baguette de noisetier. Plus de peur que de mal, Pépère était près de toi.

Ulysse, un petit cousin âgé d'un an qui dort comme toi à la maison - tes parents sont partis pour deux jours, à vélo sur la Veenbahn - ne te quitte pas des yeux, fasciné par ce grand garçon qui court dans tous les sens à travers le jardin.

Durant ce dimanche de fête des pères, nous avons discuté et changé d’avis concernant notre voyage en Italie. Nous partirons avec les enfants début juillet.

Lundi 14 juin:

La Belgique est le pays de l’Union Européenne qui vaccine le plus quotidiennement.

Alice est écartée de l’école car une fille de sa classe est positive au Covid. Ce qui est incroyable, c’est qu’elle est déçue de ne pouvoir faire ses tests de fin d’année.

Dans le journal « La libre » :

la Belgique repasse en orange sur la carte des voyages du Centre européen de prévention et de contrôle des maladies (ECDC), après plusieurs mois en rouge.

Depuis plusieurs semaines maintenant, les indicateurs relatifs à l'évolution de la pandémie en Belgique évoluent dans le bon sens. L’incidence du virus (ndlr: le nombre de nouveaux cas par tranche de 100 000 habitants) est passée sous la barre des 150 sur deux semaines. Elle est pour l'instant de 143,6 cas pour 100 000 personnes. Notre pays peut donc repasser en orange sur la carte de l’ECDC.

Mardi 15 juin

Nous partons pour quelques jours en Bourgogne, nous continuons à pister nos cousins Bourguignons retrouvés dans le livre de Bart Van Loo. Comme je n'ai reçu le deuxième vaccin que depuis une semaine, je suis obligée de faire un test PCR dont je reçois le résultat négatif le jour même. Alice est également négative comme toutes les filles de sa classe

qui auront éludé leurs examens de fin d’année scolaire.

Didier, comme de nombreux Français, regarde le premier match de foot de la France

contre l'Allemagne dans le cadre de l'euro 2020 qui devait se tenir l'année dernière

et a été reporté à cet été. Pendant ce temps, je divague dans les rues piétonnes de Dijon, visitée cet après midi avec Bruno, un greeter dont nous étions les premiers visiteurs

depuis six mois. Je constate que les masques tombent en même temps que la nuit.

Sur les terrasses de la place de la liberté, les supporters qui de loin semblent agglutinés

aux écrans, sont assis par table de quatre. La clameur enfle à chaque phase de jeu.

Il est presque 23:00, l'heure du couvre-feu, je quitte la foule pour la quiétude des vieilles rues ou quelques ombres courent encore sur les murs. Je n'ai rencontré aucun policier

et les supporters ne seront certainement pas rentrés au bercail avant l'heure fatidique.

Je ne m’attendais pas à autant de laxisme en France.


Ainsi, on comprend mieux!

Eglise Saint-Michel à Dijon.

Jeudi 17 juin

Tout comme Didier, j'ai reçu mon QR code sur Covidsafe, il devrait nous permettre

de voyager avec plus de facilités à partir du 1er juillet.

Aujourd'hui 70km le long et à proximité du canal de Bourgogne. Les 20 derniers km,

je les fait sans assistance, mon compteur étant en panne. Pffft.

A partir d'aujourd'hui, en France, le port du masque n'est plus obligatoire dans les rues.

C'est une bonne nouvelle par cette canicule. Le couvre-feu qui durait depuis huit mois,

sera aboli ce dimanche vingt juin.

Au Brésil, on dénombre plus d’un demi million de morts du COVID, chez nous les 25.000

ont été atteints il y a une dizaine de jours. Lisbonne reconfine à nouveau.

Vendredi 18 juin:

Le périple du jour, nous fait suivre la route des grands crus : Beaune, Pommard, Volney, Meursault, Puligny, Chassagne et Santenay par une chaleur caniculaire.

Heureusement, nous avons emporté une gourde d’eau!

Dimanche 20 juin:

« Hey Bulldog » à la radio me rappelle la cour vitrée, adossée au mur de la colline et jouxtant la pièce à vivre de notre maison d'enfance. Nos armoires à jouets y étaient suspendues. Une double pour Françoise, Pierre et moi et une double pour Bernadette,

à qui je devais certainement « emprunter » ce disque en cachette pendant

que mon ainée était coincée à l’internat.

Lundi 21 juin:

Notre voyage à l’étranger s’est passé sans encombres. Partir est cependant toujours fortement déconseillé. Les mesures nous ont semblé peser de moins en moins sur

la population française que nous avons rencontrée.

Mardi 22 juin:

Les orages et la grisaille succèdent à la canicule.

Lucie a pour la première fois pris le train seule pour retrouver sa cousine à Liège.

Mercredi 23 juin :

Alice a accompagné Didier à ses leçons d’alphabétisation. Pour une fois qu’il avait préparé son sujet à l’avance - il ne voulait pas décevoir sa petite-fille -, il n’a pas donné cours.

C’était une matinée de fin d’année autour d’une tarte et d’un café.

Jeudi 24 juin:

Je pars à Bruxelles, en train avec Alice, découvrir l’exposition de Francoise.

Cela se passe dans une librairie de la place des Martyrs où Alice achètera son premier livre: « Congo" de David van Reybrouck qu’elle compte offrir à sa maman pour son anniversaire.

De l’équinoxe du printemps à celui d’automne, ma soeur a récolté un végétal par jour,

qu’elle dessine au crayon avant d’en faire une décoction, de colorer le dessin avec ce jus puis de teindre une boulette de huit grammes de laine qu’elle tissera avec celle des jours suivants pour former une longue écharpe de couleur. Le résultat est magnifique.

Toutes les nuances de beige, gris, jaune, rose ou brun sautent d’une bande à l’autre

pour exprimer ce drôle d’herbier.

Vendredi 25 juin:

Vous êtes tous les cinq à la maison. Tu as changé tes beaux cheveux de marquis

pour une coupe de petit page. Avec ton sourire de canaille et tes yeux qui racrolent comme on dit chez nous, je ne peux pas résister à ta demande pour regarder un épisode de la petite taupe, un dessin animé tchèque de plus de cinquante ans superbement dessiné.

Samedi 26 juin:

Ce matin, il est 7:30 quand tu te réveilles, tu n’as même pas entendu mon réveil aIors

que ta maman me certifie que tu te lèves tous les jours aux aurores pour venir dans son lit.

Après avoir caressé le jeune chat sauvage qui squatte notre jardin, Bienne entre dans

la cuisine pour se laver les mains et avant que je n’ai eu le temps de lui passer un drap,

les essuie avec son écharpe. Comme je suis en train de lire « Ode » de David Van Reybrouck, nous faisons celle de notre écharpe, celle qui sert à se protéger du soleil,

du froid, à soutenir les bébés et les bras cassés et même à me faire une jupe : après une séance de pêche au Sénégal où nous étions partis à quatre sur une pirogue,

le temps passant et le clapotis de l’eau aidant, mon envie d’uriner était devenue de plus

en plus forte, au point qu’à l’accostage, passant d’une barque à l’autre, les jambes tanguant en cadence, ma vessie m’avait lâché et je m’étais retrouvée avec la pantalon trempé.

Ni une, ni deux, j’avais drapé mon écharpe autour de mes hanches, le temps que mon pantalon rincé dans l’eau du Siné Saloum sèche au soleil.

A midi, je mange un morceau de poulet froid qui reste d’hier. C'est le même que nous dévorions lors d'un pique-nique dominical, le long du ruisseau de Bonnerue où papa tentait d’attraper à main nue les truites tapies sous les pierres. Au retour, la vieille Dauphine surchargée avait calé au carrefour. Papa nous avait tous fait descendre et nous avions, gênés, poussé la voiture sous l’oeil goguenard des passants.

Dimanche 27 juin:

Pierre s’est arrêté avec sa vieille Peugeot 403. Maman assise à l’avant ne déparait pas

dans ce vieux tacot. Un peu anxieuse par le manque de ceinture de sécurité mais réconfortée par la médaille de Saint-Christophe qui ornait la boite à gants.

Mardi 29 juin:

Retour au cinéma depuis des mois, quel plaisir!

Jeudi 1er juillet:

Le EU Digital Covid Certificate est en vigueur à partir d’aujourd’hui, il consiste

en un QR code qui s’affiche en rouge ou en vert en vertu des informations sur la vaccination. Il est donc lisible dans toutes les langues mais tous les pays ne sont pas encore équipé

pour le lire!

Didier est enfin arrivé à obtenir ses PLF (Passenger Locator Forms) pour que nous puissions partir lundi. Ce formulaire nous demande les pays que nous traverserons

et l’endroit où nous nous rendons. Cette obligation limite notre libre circulation dans l’UE, cette liberté si chère à tous les Européens.

Vendredi 2 juillet:

Ton papa devait venir nous retrouver dans les Dolomites à vélo mais les contraintes administratives liées au Covid sont tellement astreignantes qu’il a préféré partir avec Jérôme pour le tour de Belgique. Il vient d’arriver à la frontière allemande, à Moresnet, longtemps considéré comme territoire neutre. Les anciennes mines de zinc connues aux 18ième

et 19 ième siècles comme les plus riches d’Europe ne devant pas plus profiter à la Belgique qu’à l’Allemagne.

Dimanche 4 juillet:

Géraldine et les cinq petits sont partis à Bastogne pour se faire tester avant de partir

demain matin. Les tests PCR sont obligatoires pour entrer en Italie et doivent avoir

moins de 72 heures. Trouver un centre ouvert le dimanche après-midi n’a pas été facile.


Lundi 5 juillet:

Partis avec la pluie nous arrivons en Bavière avec le soleil. Les résultats négatifs des tests d'hier sont arrivés ce matin vers 11.00.

Alice et Félix sont dans notre voiture, tu es avec ta sœur et Lucie dans celle de Géraldine. Didier nous a trouvé un bel hôtel à Weilheim où nous logeons à quatre par chambre.

Dans le biergarten, tu me montres les perroquets sur le toit de l'église. Ils sont noir et blanc avec un long bec et des pattes d'échassier. Ils me font plutôt penser à des cigognes !

Mardi 5 juillet:

Il est 7.00 quand Didier et ta maman se réveillent pour partir chez le garagiste ausculter

la Toyota qui hier pendant les 150 derniers km montrait des signes de faiblesse.

La route via Innsbruck et le col du Brenner est magnifique. Nous passons la frontière italienne deux minutes avant l'heure édictée par le test des enfants qui n'est valable

que 48 heures.

Mercredi 6

Déjeuner sur la terrasse ensoleillée puis rando en montagne. Notre pass-télécabine à été bien rentabilisé, nous avons effectué une dizaine de voyages sur la journée. Il y a une semaine, Géraldine refusait encore d'y monter suite à l'accident de Stresa en mai dernier

qui avait fait quatorze morts.


Jeudi 7 juillet

Après une nuit d'orage et un temps incertain, nous descendons à Bolzano avec nos pass de bus gratuits. La ville est noire de monde. Le port du masque n'est obligatoire qu'à l'intérieur et les musées sont libres d'accès sans réservation.

Au souper, Géraldine reçoit deux knödels, ces grosses boulettes autrichiennes composées principalement de pain. Cela me rappelle notre halte dans un restaurant proche de Nuremberg où les souvenirs nazis tapissaient l'arrière salle, seul endroit encore disponible pour trouver une place assise. Elle m'avait demandé de lui commander des sauteuses de pré à l'ail et avait reçu à la place ces mêmes boulettes. Je pense que c'est ce jour là qu'elle a découvert que mon allemand n'était pas parfait!


Vendredi 9 juillet

Trois heures de rando en montagne, les ados marchent sans rouspéter, jouant à "il ou elle", "dans ma valise, il y a " ou "ni oui ni non". Tu cours pas mal dans les flaques de boue

puis t'endors sur le dos de sa maman qui grimpe sans se plaindre. Elle a changé depuis

ses dix ans où Didier donnait un petit coup de baguettes sur ses mollets pour la faire grimper dans les alpages.



Aujourd'hui les ados ne sont pas allés, à la piscine municipale dont on revient par la ruelle de l'église raide comme un mur. Ils nous ont accompagnés au sauna. Paola y restera

trente secondes avant de s'enfuir, ses cousins résisteront une dizaine de minutes.

En en sortant,, je les retrouve allongés sur les transats de la terrasse, en train

de se masser.


Samedi 10 juillet.

Au retour, aucun contrôle aux frontières, ni à l'hôtel de la petite ville thermale du Wurtemberg où le personnel ne porte pas le masque.


Dimanche 11 juillet:

Nous sommes arrivés à bon port malgré l'état de la voiture de Géraldine qui l'inquiète

de plus en plus.






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